
Pour clôturer la saison 2025, les six meilleures équipes du monde se retrouvent à Tokyo pour le traditionnel World Team Trophy, organisé tous les deux ans par le Japon. Sans surprise, les nations qualifiées sont les États-Unis, le Japon, l’Italie, la France, le Canada et la Géorgie. Chaque pays est représenté par un couple artistique, un couple de danseurs, deux messieurs et deux dames. Ce format, légèrement différent de celui de l’épreuve olympique par équipe, met en lumière les catégories individuelles, ce qui avantage souvent le pays hôte.
Le Japon et les États-Unis font figure de favoris. Côté japonais, les forces sont concentrées dans trois catégories : Kaori Sakamoto, Mone Chiba, Yuma Kagiyama, Shun Sato ainsi que Riku Miura & Ryuichi Kihara. Les danseurs Utana Yoshida & Masaya Morita auront en revanche davantage de mal à rivaliser. Les Américains alignent une équipe redoutable, emmenée par trois champions du monde : Alysa Liu, Madison Chock & Evan Bates, et Ilia Malinin. Amber Glenn, Jason Brown ainsi qu’Alisa Efimova & Misha Mitrofanov complètent la sélection.
Les Italiens viseront la médaille de bronze avec Charlène Guignard & Marco Fabbri, Sara Conti & Niccolò Macii, Anna Pezzetta, Lara Naki Gutmann, Daniel Grassl et Nikolaj Memola.
À noter que la Géorgie a fait appel à deux revenants, Morisi Kvitelashvili et Alina Urushadze, pour renforcer son équipe.
Côté français, nous aurons le plaisir de retrouver Kévin Aymoz, capitaine de l’équipe, aux côtés d’Adam Siao Him Fa, Léa Serna, Lorine Schild, Camille & Pavel Kovalev, et Evgeniia Lopareva & Geoffrey Brissaud.

La compétition débute avec la danse rythmique, lors de laquelle Evgeniia Lopareva et Geoffrey Brissaud prennent la quatrième place avec 81,78 points : “C’est la performance que nous voulions faire aux Mondiaux ! Nous aurions aimé battre notre record de la saison, mais 81 points, c'est très bien. Notre record était à 82. Cela confirme que le score est solide. Nous avons obtenu un niveau 4 sur la PSt, ce qui n’est pas arrivé souvent cette année. Il n’y en a même pas eu aux Championnats du Monde ! Cela vaut de l’or (sourire). Cette danse rythmique nous a fait exploser cette année, et nous voulions lui faire honneur une dernière fois. C’était un très bon choix, nous en sommes vraiment contents et elle a très bien évolué. Après, nous ne sommes pas déçus de la laisser. Nous connaissons toutes les paroles, cela suffit (rires), nous pouvons changer. Nous avons la chance d’avoir une très belle équipe de France. Nous sommes très soudés, tout le monde était présent pendant notre programme, même ceux qui patinaient juste après. C’est la même équipe qu’il y a deux ans et nous avons créé des liens forts.”
Ils sont devancés par les trois ténors de cette compétition, dans l’ordre désormais classique : Madison Chock et Evan Bates, Piper Gilles et Paul Poirier, Charlène Guignard et Marco Fabbri.

Chez les messieurs, Ilia Malinin et Jason Brown frappent fort en s’emparant respectivement de la première et de la troisième place. Ilia Malinin déroule son contenu technique habituel, quadruple flip, triple Axel, quadruple Lutz triple boucle piqué, même si la fatigue de fin de saison se fait sentir : le flip est retourné, fait rare chez lui. La troisième place de Jason Brown est plus inattendue, notamment devant les deux Japonais. Très apprécié au Japon comme aux États-Unis, il signe un programme sans faute, avec un beau triple Axel. Le public en redemande et la note s’envole : 93,82 points.

Les Français Adam Siao Him Fa et Kévin Aymoz prennent respectivement la deuxième et la sixième place. Après un échauffement difficile, tout rentre dans l’ordre pour Adam pendant son programme : quadruple Lutz (avec une main), quadruple boucle piqué triple boucle piqué, et triple Axel. Il obtient 96,16 points, tout près de son meilleur score de la saison. De son côté, Kévin chute sur le quadruple boucle piqué mais ne lâche rien : le triple Axel et la combinaison triple Lutz triple boucle piqué sont réussis. Une belle performance pour le Grenoblois, qui avait montré des difficultés dans le passé à faire abstraction des erreurs en cours de programme. Il obtient 88,07 points.
Kevin : “J’ai eu 40 de fièvre toute la nuit et je perds ma voix, mais tout va bien. Nous sommes là pour l'équipe et cela fait énormément de bien. Pour ma part, je suis très content. Les entraînements se sont très bien passés, j’ai refait le quadruple Salchow, pas dans le programme court, mais plutôt en vue du libre. Je ne me suis entraîné que quatre jours depuis mon retour des Championnats du Monde, avec les nombreux galas de Holiday on Ice. Mais depuis que je suis arrivé au Japon, je n’ai quasiment rien raté à l’entraînement, et je me sens très bien. Je n’ai pas réussi le quadruple dans le programme, je l’ai senti tout de suite. Alors j’ai simplement serré pour assurer les quatre tours. Ensuite, pour le reste du programme, je savais qu’il fallait replacer la combinaison, mais cela ne m’a pas stressé une seule seconde. J’étais très confiant sur l’ensemble du programme. Je pense que j’ai tiré les leçons du passé : avant, quand je faisais une erreur, je n’arrivais plus à me remettre dans le programme. Là, dès que le quadruple a été raté, j’ai oublié ce qui s’était passé et je me suis dit : on fonce, on fonce, on fonce.”
Sur le fait de patiner en compétition sans ses coachs : “C'est un bon exercice. M'être entraîné au quotidien seul à Lausanne m’a aidé. J'ai appelé Françoise et Sylvia bien sûr !”
Adam : “Ce n'étaient pas les meilleures six minutes d’échauffement que j’ai connues. J'avais besoin de me remettre dans la glace. Le boucle piqué nécessitait un réglage, c'était déjà le cas ce matin à l'entraînement. Je me sentais plutôt confiant, même si ce n'était pas parfait. Je n'avais pas eu énormément de préparation : mon dernier programme court remontait aux Mondiaux. Je disais à Cédric que tout se jouerait dans la tête, et que cela n'allait pas être évident. Mais dans l'ensemble, les entraînements étaient bons, même meilleurs qu'avant les Mondiaux. C’est très positif, car en revenant de Boston, j’étais dans un état de fatigue extrême. Je n’arrivais plus à m’entraîner : j’étais constamment dans le rouge, au point de sentir que je risquais de me blesser à nouveau. C’était assez délicat à gérer. Nous avons essayé de faire très attention à la charge : elle n’était pas très élevée, mais il fallait quand même s’entraîner un minimum. On s’est dit : bon, on y va comme ça, et il faudra s’adapter. Et au final, je fais un meilleur programme court qu’aux Mondiaux !”

À domicile, les Japonais doivent se contenter de la quatrième place pour Yuma Kagiyama (93,73) et de la cinquième pour Shun Sato (93,68). Yuma présente une superbe combinaison quadruple boucle piqué triple boucle piqué ainsi qu’un excellent triple Axel, mais échoue sur le quadruple flip, réceptionné à trois tours, à l’image de l’échauffement où toutes ses tentatives avaient été infructueuses. Shun Sato signe un programme sans faute sur "Ladies in Lavender". Son quadruple boucle piqué est magistral (GOE +3 à +4), mais il ne tente pas le quadruple Lutz réussi aux Mondiaux, préférant une plus prudente combinaison triple Lutz triple boucle piqué. Le triple Axel est également réussi. Malgré la qualité de son programme, la note ne décolle pas.
L’Italien Daniel Grassl est septième avec 87,07 points. Il tente deux quadruples (Salchow et boucle), réceptionnés avec des rotations incomplètes. Son triple Axel, en revanche, est bien réalisé. Son compatriote Nikolaj Memola semble vivre une fin de saison difficile. Sa préparation poussive sur le flip débouche sur un double. Le triple Axel est correct, mais le quadruple Lutz en fin de programme est retourné, empêchant la réalisation de la combinaison. Il est onzième (69,20 points).
Le Géorgien Nika Egadze se classe huitième avec 84,76 points. Il réussit un quadruple Salchow triple boucle piqué, ainsi qu’un bon triple Axel, et sauve de justesse un quadruple boucle piqué mal engagé. Pas de miracle pour Morisi Kvitelashvili, de retour après avoir pris sa retraite fin 2023. Réussir le triple Axel constituait déjà une belle performance compte tenu des circonstances. Sa tentative de quadruple boucle piqué (ou Salchow… les deux étant quasi indifférenciables chez lui) en fin de programme, conclue par une lourde chute, semblait pour le moins hasardeuse. Il termine douzième avec 59,54 points.
Côté canadien, Roman Sadovsky se défend bien avec la neuvième place (84,75 points). Cela n’est cependant pas suffisant pour compenser la onzième place d’Aleksa Rakic.
Chez les dames, Alysa Liu, récente championne du monde surprise à Boston, signe un programme quasi sans faute : triple flip triple boucle piqué, double Axel et triple Lutz. La rotation du boucle piqué est discutable, mais le panel technique ne la pénalise pas. Elle obtient 75,70 points et prend la tête de la compétition. Ce résultat vient compenser la contre-performance d’Amber Glenn, septième avec 63,70 points. Dommage pour celle qui avait dominé la première moitié de saison : à Tokyo comme à Boston, elle peine à convaincre. Son triple Axel est en sous-rotation et chuté, et son triple boucle manque de netteté en réception. Sa combinaison triple flip double boucle piqué est réussie mais le boucle piqué était bien sûr prévu en triple.

Kaori Sakamoto se classe deuxième, en raison d’un retournement sur le triple flip de la combinaison. Elle parvient toutefois à enchaîner avec le triple boucle piqué, et réussit sans difficulté le double Axel et le triple Lutz. Mone Chiba termine quatrième (69,66 points), pénalisée par une chute inhabituelle sur le double Axel. Le reste du programme est solide, notamment la combinaison triple Lutz triple boucle piqué et le triple flip.
Pour la Géorgie, Anastasiia Gubanova prend une belle revanche après la déception des Mondiaux où elle n’avait pas accédé au programme libre. Elle est troisième avec 69,80 points. Sa coéquipière Alina Urushadze, en revanche, est hors de forme et termine douzième avec 38,77 points.

Très belle prestation de Lorine Schild, qui conclut sa saison avec un programme sans faute : triple Lutz triple boucle piqué, double Axel, triple boucle. Elle bat son record de l’année avec 63,66 points et se classe huitième. Léa Serna, handicapée par une blessure à la cheville, termine onzième (57,68 points). Elle réussit néanmoins l’ensemble de ses sauts : triple boucle piqué double boucle piqué, triple Salchow et double Axel.
Léa : “Hier, à l’entraînement, je me suis fait une grosse blessure à la cheville sur un départ de Lutz. Probablement une entorse. Je ne pouvais pas marcher. Aujourd’hui je boite, mais je tenais à faire ce programme. J’avais mal à l’échauffement, mais je me suis dit que si je retirais le Flip et le Lutz, je pouvais quand même marquer deux ou trois points pour l’équipe. J’ai fait boucle piqué, Salchow, Axel. Le but n’était pas de me faire encore plus mal, surtout que la nouvelle saison va recommencer rapidement. Évidemment, je suis frustrée de m’être blessée et je ne suis pas satisfaite de ma performance, mais j’ai fait ce que j’ai pu avec les moyens du moment. Pour le libre, je ne sais pas encore. Je sens que j’ai bien tiré sur ma cheville, et passer de trois sauts à sept, c’est une grosse différence pour le corps. Je vais en discuter avec ma fédération et mon entraîneur.”
Lorine : “Nous n’avons vraiment pas de chance sur cette compétition. De mon côté, c’est un crochet qui s’est cassé, c’est la première fois que cela m’arrive. Nous avons pu le réparer. Mais j'ai toujours cette douleur à l’orteil qui ne passe pas. Cela allait mieux à Boston, mais c’est revenu. Cela met du temps à guérir. Malgré tout, j’ai réussi à bien me concentrer, j’étais prête. Je suis super contente de ce que j’ai fait, surtout de la combinaison. Je voulais me faire plaisir en patinant ce programme une dernière fois.”

Lara Naki Gutmann obtient la cinquième place pour l’Italie. Sa compatriote Anna Pezzetta, toujours aussi impressionnante par l’amplitude de ses sauts mais malheureusement irrégulière, termine neuvième.
Côté canadien, Madeline Schizas et Sara-Maude Dupuis se classent respectivement sixième et dixième.
A l’issue de cette journée, l’équipe de France prend une troisième place provisoire. Un mot du capitaine Kévin Aymoz : “C’est une bonne journée, nous sommes troisièmes ! Nous avons tous des petits soucis : je suis malade, Adam est un peu cassé de partout, Léa s’est blessée et Lorine a cassé sa bottine. Le podium est ouvert pour la troisième place mais ce n’est pas l’objectif principal. Nous sommes là avant tout pour nous faire plaisir et célébrer le patinage. J’étais déjà capitaine en 2021 et 2023. J’avais proposé à mes co-équipiers de prendre le relai mais ils ont tous refusé et ils m’ont désigné ! Je suis très heureux qu’ils me fassent confiance. L’année dernière quand j’ai voulu arrêter le patinage, ils m’ont tous écrit pour me dire de continuer. Leur soutien représente beaucoup pour moi.”

Solène Mathieu - Skate Info Glace
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dodo (dimanche, 20 avril 2025 16:53)
;-))