Interview Océane Piégad et Denys Strekalin

Angers - 3 novembre 2023


Dans un contexte médical difficile, et alors que la présence d’Océane Piégad et Denys Strekalin au Grand Prix de France n’était pas confirmée jusqu'à quelques jours avant la compétition, le couple français a réalisé deux bons programmes et s’est classé cinquième de la compétition. 

 

Solène : Vous avez failli déclarer forfait avant la compétition en raison d’une blessure d’Océane. Comment allez-vous ?

Océane : J'ai des douleurs aux pieds depuis un peu plus d’un an. J'ai fait beaucoup d'examens médicaux, c'est d’ailleurs pour cela que je me suis arrêtée un temps et que nous n’avons pas pu aller aux championnats de France Elites l’année dernière. Cette blessure est malheureusement longue à guérir. Nous avons des difficultés à trouver des solutions durables et un protocole qui soit efficace pour mon pied. Ce n’est pas facile au quotidien, mais nous avons tout de même décidé de venir à Angers.

Denys : Après le Grand Prix d’Angers 2022, les douleurs d’Océane se sont accentuées et nous avons compris que sa blessure n’était pas anodine. Nous avions déclaré forfait pour plusieurs compétitions pour prendre le temps de soigner son pied.

Océane : J’avais une botte de marche pour mon pied, mais en parallèle je suis tombée dans les escaliers et je me suis fait une entorse de l'autre cheville. J’ai accumulé les problèmes. Cela a aussi porté préjudice au pied qui me faisait mal initialement, puisque je devais aussi m'occuper de l’entorse. Cela va mieux désormais et les médecins m’ont confirmé que nous avions fait tout ce que nous pouvions. Nous n’avons pas brûlé les étapes. Il faut toutefois continuer les soins, car la blessure persiste.

 

Solène : Comment vous êtes-vous préparés pour le Grand Prix avec cette contrainte ?

Denys : Dernièrement, les douleurs ont été très fortes et c'était compliqué à gérer. Nous avons envisagé de déclarer forfait et nous en avons parlé avec Laurent Depouilly. Nous avons beaucoup travaillé pour pouvoir être présents à Angers et notre dernière compétition, la Coupe de Nice, s’était bien passée malgré les douleurs. Nous avons donc pris la décision de participer au Grand Prix en modifiant le contenu de nos programmes. Nous avons enlevé le triple boucle piqué pour qu’Océane n’appuie pas trop avec son pied gauche lors du piqué. Nous l’avons remplacé par un triple Salchow dans le programme court et par un double Axel dans le programme libre.

Océane : J’arrive à réaliser le triple boucle piqué, mais parfois la douleur est très soudaine. Quand cela arrive, c’est compliqué de contrôler mes mouvements, et cela peut être dangereux. Nous maîtrisons le triple Salchow en plus du triple boucle piqué et du double Axel donc cela nous laisse la possibilité de modifier le contenu du programme.

Denys : Globalement, notre préparation a été courte. Nous avons fait un stage à Pralognan puis Océane a eu une infiltration le mercredi, une semaine avant la compétition. Nous avons parfois dû privilégier des exercices de portés au sol, sans solliciter le pied gauche. 

Océane : Nous avions très envie de venir, mais nous ne souhaitions pas que cette compétition soit la dernière de notre saison. Il y a d'autres échéances importantes à venir. Nous n’avions pu patiner que la moitié de la saison l'année dernière. C’était difficile, et nous ne voulions pas revivre cela. Nous voulons présenter nos programmes tout au long de la saison et montrer une progression constante.

 

Solène : J’imagine que l'intégration récente du triple Salchow dans votre programme court explique la désynchronisation que nous avons vue à Angers.

Océane : Nous avions effectivement peu travaillé notre programme court avec l'ajout du triple Salchow. Lors du stage à Pralognan, nous y avions réfléchi pour ajuster la courbe, mais cela reste relativement nouveau.

Denys : Nous intégrons ce saut dans le programme libre depuis un moment, mais la courbe est légèrement différente.

 

Solène : Dans ce contexte, quel bilan faites-vous de vos performances à Angers ?

Denys : La compétition s'est finalement bien déroulée, nous avons réalisé nos meilleurs scores de la saison sur les deux programmes, ce qui est extrêmement satisfaisant. C'est toujours un plaisir de patiner en France, avec le soutien et l'enthousiasme du public. Nous avons dépassé les 100 points dans le programme libre. Le programme court était aussi plutôt bon, malgré la chute sur le triple flip lancé. Compte tenu de la préparation courte, je trouve que nous avons bien patiné. Nous avons fini en cinquième place, ce qui est une belle progression après notre septième place en 2022.

Océane : Nous avons montré de beaux programmes, malgré une préparation écourtée et cette décision de dernière minute concernant notre participation. J’ai chuté sur le triple flip lors du programme court, mais c'est généralement l'un de nos meilleurs éléments.

Denys : Honnêtement, je me rappelais à peine de la dernière fois qu’Océane était tombée en réception d’un flip lancé.

Océane : Effectivement, cela faisait longtemps, ce qui constitue une vraie amélioration par rapport à l'année dernière. Avant, même si nous réussissions les éléments à l'entraînement, c'était plus difficile en compétition avec le stress et notre manque d’expérience ensemble. Nous avons depuis acquis une solidité dans notre patinage.

 

  

Solène : Vous aviez déclaré forfait aux Masters cette année, en raison d’une collision à l’entraînement. Que s’était-il passé et est-ce que cela a eu des conséquences médicales ?

Océane : Ma tête a touché la glace, j'ai souffert de maux de tête et de douleurs cervicales. J'avais aussi des éraflures dans le dos. C'était plus effrayant que douloureux ; c’était un obstacle supplémentaire à surmonter. Ces difficultés sont désormais derrière nous, il n'y a pas eu de conséquences graves. C’était frustrant, car nous étions vraiment bien préparés pour cette compétition. Nous avions travaillé sur la vitesse et sur des points relevés lors du Lombardia Trophy. C'est d'autant plus frustrant quand on a cette envie de patiner et qu'on ne peut pas le faire. Finalement, c'était davantage un choc psychologique. Heureusement, je n’ai pas été blessée sérieusement. D’ailleurs, je voulais patiner à nouveau tout de suite mais les médecins ont refusé.

 

Solène : A vous entendre Océane, j’ai l’impression que vous êtes toujours partante pour patiner et que votre entourage doit parfois vous freiner !

Océane : (rires)

Denys : Après le choc à la tête d'Océane, la consigne des médecins était qu'elle se repose pendant 24 heures et fasse preuve de prudence. Seulement deux heures après, elle voulait déjà patiner notre programme court ! On lui a dit non... Nous devions attendre 24 heures pour être absolument sûrs qu'elle n'avait subi aucun dommage sérieux.

 

Solène : Revenons sur la Coupe de Nice, qui a été une belle réussite pour vous.

Océane : C'était effectivement une bonne compétition. En fait, nos performances à Angers étaient assez similaires à ce que nous avons réalisé à Nice, à l'exception de l'erreur sur le flip dans le programme court. Nous avions en revanche un niveau 2 sur un porté. Depuis, nous avons travaillé pour atteindre un niveau 4.

Denys : Patiner en France est toujours une expérience particulière. Océane est originaire de Nice. Nous avons eu la chance d'avoir le soutien du public local. Merci à tous !

 

Solène : Quelles sont les étapes à venir dans votre saison ?

Océane : Nous disposons de quelques semaines de préparation avant le Championnat de France Elites. Il est important de prendre le temps nécessaire pour me soigner et être pleinement prêts. Nous ne participerons pas à d'autres compétitions, d'autant plus que nous avons déjà participé à deux épreuves du Challenger Series.

Denys : Nous avons déjà obtenu les points techniques minimaux nécessaires pour une éventuelle participation aux championnats d’Europe et du monde. Cette année, il y a deux places disponibles pour les couples français aux Championnats d'Europe, ce qui est une opportunité pour nous. Ce sera important d’obtenir un bon résultat aux Championnats de France Élites. Cependant, comme c'est le cas avant chaque compétition, nous ne nous mettons pas de pression inutile en visant une place spécifique. Notre stratégie consiste simplement à patiner proprement et à donner le meilleur de nous-mêmes.

 


Solène MATHIEU - Skate Info Glace