© Alice Alvarez
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Grand Prix de France - Programme court couples

Angers - 3 novembre 2023


 

0,66. C'est le (tout petit) nombre de points qui séparent les Canadiens Lia Pereira/Trennt Michaud (65.97) des Italiens Sara Conti et Niccolo Macii (65.31). Sur "River" de Bishop Briggs, très en vogue depuis l'an dernier, Lia et Trennt patinent un programme très propre. Les niveaux et les notes ne crèvent pas le plafond, mais tous les éléments sont bien exécutés. La jambe libre de Lia traîne un peu à la réception du tripe boucle lancé, sans que ceci les pénalise. Triple twist, triple Salchow et porté sont solides. L'ensemble manque un peu de personnalité, mais le patinage est élégant et convaincant.

 

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Les champions d'Europe en titre semblent en forme mais Sara retourne la réception du triple boucle lancé, récoltant des GOEs négatifs, ce qui empêche le couple italien de prendre la tête. Même s'ils montrent plus de caractère sur la glace, je leur préfère néanmoins les Canadiens, les performances de Sara et Niccolo étant toujours empreints d'un classicisme qui vire au démodé. "Pagliacci" (en français, "Paillasse"), est une oeuvre de Leoncavallo pleine de drame et d'intensité. Je ne retrouve pas l'atmosphère ténébreuse de confusion entre rêve et réalité de la partition musicale. Seule la séquence de pas se détache de cette performance trop sage, par une belle recherche de variété et de complexité. 

 

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On a beaucoup entendu "The Feeling Begins" dans les patinoires et depuis fort longtemps. Mais Camille et Pavel Kovalev en font un programme extrêmement élaboré, très visuel et très cohérent. Les costumes sont superbes, l'amplitude des gestes et la vitesse de déplacement sont remarquables. L'ensemble a pris "du corps" depuis le début de la saison, tout est plus dense, plus intense. Le triple twist d'entrée est légèrement touché en réception, ce qui entraîne une rude ligne de grades négatifs. Le triple flip lancé est bon. Leur coach, Laurent Depouilly, saute de joie derrière sa barrière à la réception d'un triple boucle piqué parallèle bien maîtrisé. La séquence de pas démarre bien, mais Camille, sans doute déconcentrée après les plus grosses difficultés passées, commet une belle faute de carre et s'agenouille. La faute est sanctionnée sans trop de sévérité. Puis Pavel, à la fin de la pirouette de clôture, tente bravement de transformer le posage inopportun d'une fesse sur la glace en figure de style. Les juges ne sont pas dupes : un point de déduction pour chute et une jolie avalanche de -4 et -5. Dommage car la performance jusque là était de qualité. Les Français sont 3èmes avec 59.04, ce qui est tout de même une excellente place !

 

Les Américains (comme leurs noms ne l'indiquent pas) Plazas/Fernandez (4èmes, 58.46) patinent sur une Rhapsody de Paganini beaucoup trop ambitieuse musicalement pour leur niveau actuel. Les deux jeunes gens ont de très bonnes bases, une glisse soignée et des carres propres, mais des difficultés sur les éléments essentiels : grosse chute de Valentina sur le triple boucle piqué parallèle, triple boucle lancé réceptionné sur l'avant de la lame avec le second pied sur la glace. A noter cependant qu'ils sont les seuls, avec Conti/Macii à obtenir un niveau 4 sur leur triple twist. 

 

Le second couple américain Kam/O'Shea, (qui est en fait le premier par ordre de préséance) se classe 5ème avec 54.75 points. Deux chutes pour Ellie : la première sur le triple Salchow parallèle qui est retourné, la seconde, plus violente, à la réception du triple Salchow lancé. Une dernière erreur dans la pirouette gâche quasi définitivement leurs chances d'accéder demain au podium. Mais le couple n'est associé que depuis un an [Danny a gagné les Quatre Continents 2016 avec Tarah Kayne] et manque encore d'automatismes et de connexion. Avec une chute à la réception du triple lancé, les Italiens Valesi/Piazza devancent de peu Piégad/Strekalin. Le très bon groupe de rock Maneskin a un succès phénoménal outre-Alpes (et dans le monde entier) depuis sa victoire à l'Eurovision mais "The Loneliest" est devenu une véritable scie, matraquée sans interruption à la radio depuis sa sortie il y a tout juste un an. L'entendre aussi dans une patinoire me fait un peu grincer des dents...

 

Océane et Denys (52,83, 7èmes) ont un très joli programme court sur "Les Noces de Feu", musique d'un spectacle du Puy du Fou, basée sur des morceaux de Schubert et Saint-Saëns. Océane de nouveau blessée récemment, le couple a hésité jusqu'à mardi avant de décider de ne pas déclarer forfait. A l'exception d'une chute sur le triple flip lancé et de quelques erreurs dans la pirouette et sur le triple Salchow, le programme est solide et bien exécuté. Le couple est sur une belle trajectoire ascendante avec une progression régulière et évidente. Ils sont rapides, en harmonie, et leurs carres sont profondes. Pour leur tout premier Grand Prix, les élèves de Bruno Massot, Oxana Vouillamoz et Flavien Giniaux obtiennent un bon score de 51.56 malgré des erreurs "de jeunesse". Un peu tendus, mais romantiques et délicats, ils font preuve d'une vraie sensibilité musicale sur le très joli "Fortitude" de Heaven qui n'est pas sans me rappeler un certain "La Terre Vue du Ciel" patiné en son temps par leur "maître". Il y a un gros potentiel chez ce couple, qui aujourd'hui rate son triple twist alors que c'est, d'habitude, leur élément le plus fiable. Mais un premier plongeon dans le grand bain international senior, en particulier dans son pays natal, est une épreuve difficile.


Kate Royan - Skate Info Glace