Quatre Continents - Libre couples

Compétition couples - Programme libre


© Rumi Hirakiuchi
© Rumi Hirakiuchi

 

La danse sur glace a longtemps été la discipline des "aînés", celle dans laquelle les patineurs battaient des records de longévité, i.e. dépassaient la trentaine. Depuis une petite décennie, ce sont les couples qui ont pris l'avantage. Grâce à quelques messieurs, mais surtout à des femmes : Aljona Savchenko médaillée d'or olympique à 34 ans (avec Bruno Massot) ;  Zoe Jones, retraitée individuelle en 2001, revenue à la compétition par couples de 2014 à 2022, soit de 34 à 42 ans en étant mère de trois enfants ; et enfin Deanna Stellato-Dudek, qui après un interlude de seize ans sans compétition, est revenue sur le circuit en 2016 à 33 ans pour patiner avec Nathan Bartholomay. Aujourd'hui associée à Maxime Deschamps, dont elle est la 5ème partenaire, elle fêtera ses 41 ans en juin prochain. Elle pourrait être la mère des trois dernières championnes olympiques, et elle et Maxime ne cessent de progresser. Au contraire du proverbe, la valeur doit parfois attendre le nombre des années !  Déjà reconnue pour son talent et sa détermination, Deanna devient ici à Shangaï une reine, une star.

 

En tête après le programme court, Stellato-Dudek/Deschamps remportent la médaille d'or avec un total de 198.80. Sur le thème de "Entretien avec un Vampire", Deanna a une telle personnalité qu'elle semble beaucoup plus dangereuse que victime malgré sa robe ensanglantée. Maxime en est quelque peu éclipsé. Ce libre n'est pas exempt d'erreurs. Contact à la descente du triple Twist (niveau 2) ; un triple boucle piqué combiné en séquence à deux simples Axel chahutés, un triple Salchow sur lequel Maxime évite la chute de justesse. La suite est parfaite, en particulier le triple Salchow lancé, jusqu'au triple boucle lancé dont la réception est rattrapée d'un cheveu. La technique a été un brin écornée, les composantes ne crèvent pas le plafond, mais il se dégage de ce programme l'énergie d'une centrale nucléaire ! Deanna : "Notre triple twist était en retard, pourtant c'est un de nos points forts. Je me suis cogné le bras et j'ai ressenti des fourmis pendant tout le programme. Ca m'a déconcentrée et j'ai loupé mon Axel. J'avais un peu peur pour le porté suivant, mais tout s'est bien passé". Maxime : "Nous allons nous remettre au travail en vue des championnats du Monde. Nous avons encore des détails à régler, des choses à améliorer."

 

© Rumi Hirakiuchi
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Riku Miura et Ryuichi Kihara patinent leur libre sur "Une Chance qu'on s'a" (du québécois dans le texte !) de Céline Dion et Jean-Pierre Ferland, suivi de "Amour Infini" de Karl Hugo. Le tout est d'un sucré à vous plonger illico en coma diabétique, mais le talent du couple fait quasiment oublier le choix musical discutable. Riku et Ryuichi ne vont être que 3èmes du libre (125.16) à cause d'une rafale de GOEs négatifs par trois fois : un Axel simple au milieu de la séquence, un quarter pour le triple Salchow et une lourde chute sur le triple Salchow lancé. Ce qui ne les empêche pas de décrocher la médaille d'argent avec un score total de 190.77. Ryuichi : "En décembre, on s'est dit qu'on voulait venir à ses Quatre Continents. La décision finale a été prise en janvier. Nous avons eu peu de temps pour nous entraîner. Notre programme est un challenge technique". Riku : "Compte-tenu du peu de temps que nous avons eu pour travailler avant de venir, nous sommes très heureux de notre résultat. Nous n'avons pu patiner notre court en entier que ces deux dernières semaines, et le libre seulement pendant huit jours. Nous n'avons pas obtenu les niveaux que nous espérions, nous allons donc beaucoup travailler d'ici Montréal". 

 

© Rumi Hirakiuchi
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Les Américains Ellie Kam et Danny O'Shea remontent à la seconde place du libre (126.56) après avoir été 4èmes lors du court, ce qui leur vaut une médaille de bronze (187.28). Leur programme sera mon préféré de la journée. La musique est très belle [bande originale de "Nocturnal Animals" d'Abel Korzeniowski], la chorégraphie est parfaitement adaptée aux mélodies, le patinage est ample et léger. Au contraire de beaucoup de leurs compatriotes, et ce, dans toutes les disciplines, Ellie et Danny semblent ressentir une véritable émotion au lieu de se contenter de la mimer. Ils sont les seuls, avec leurs camarades Plazas/Fernandez, à obtenir un niveau 4 pour leur triple twist. Pas de sauts en séquence et des difficultés sur les deux sauts lancés avec une chute d'Ellie à la réception, mais le reste du programme ne souffre d'aucune erreur ou approximation. Danny : "Nous avons terminé les championnats nationaux il y a à peine une semaine et nous avons gagné, mais nous avons mieux patiné ici. Il n'y a pas si longtemps qu'Ellie et moi patinons ensemble et nous sommes dans une phase ascendante. J'ai déjà gagné une médaille ici en 2018, ça me semble très loin (rires)." Ellie : "Nous n'avons pas eu le temps de faire des changements dans nos programmes avant d'arriver ici. On a donc décidé d'y aller à fond et advienne que pourra. Nous nous entendons très bien, même dans les moments délicats". "Danny : "Nous allons rentrer à la maison travailler avec notre coach [Drew Meekins], puis lorsqu'il partira pour les Mondes Juniors, nous irons faire un séjour chez Riku et Ryuichi à Toronto avec Bruno Marcotte". 

 

La plus belle remontada du jour est signée par les Australiens Anastasia Golubeva et Hektor Giotopoulos-Moore. Partis de la 7ème place du court, ils sont 4èmes du libre (125.04) et de la compétition (183.83). Sur les "Parapluies de Cherbourg", ils réalisent une performance très propre avec une seule erreur sur le triple twist d'entrée. Ils ont d'ailleurs le meilleur TES de la compétition. Hektor : "Nous avons essayé toute la saison de patiner un programme clean et nous y sommes enfin arrivés. Nous étions déçus de notre court et la journée de pause entre les deux programmes nous a permis de nous remettre les idées au clair. Nous allons directement au Canada en partant de Shangaï pour nous entraîner avec Deanna et Maxime et nous resterons là-bas jusqu'aux championnats du Monde". 

 

Chelsea Liu et Balazs Nagy, 3èmes du court, dégringolent en 8ème position (113.95) avec une jolie collection de GOEs négatifs. Deux chutes, des erreurs sur les deux sauts lancés et les sauts en séquence, ce n'était pas leur jour. Abel Korzeniowki est de nouveau à l'honneur, cette fois avec "Roméo et Juliette", mais seuls les portés de ce programme sont corrects. Ils finissent 7èmes (175.85), derrière les vainqueurs du Grand Prix de France, les Canadiens Pereira/Michaud (182.05) et les Chinois Peng/Wang (180.22).

 

© Rumi Hirakiuchi
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