Programme court Dames


Bon choix que la ville de Grenoble pour cette nouvelle édition des Internationaux de France, puisque, toutes proportions gardées (la patinoire n'est pas immense), les tribunes sont plutôt bien remplies pour un vendredi. Coup d'envoi aujourd'hui avec le programme court Dames.

 

Disons le tout de suite, en cette année olympique, ces dames, - et les patineurs en général - ne sont pas à court de poncifs et de musiques usées. Carmen,  Libertango, Le Lac de Cygnes, noir ou blanc, on ne rivalise pas d'originalité. La Canadienne Kaetlyn Osmond tire assez facilement son épingle du jeu avec un medley d'Edith Piaf qui semble peu l'inspirer, mais avec une technique plutôt solide. Il manque le dernier tour de sa combinaison triple flip/triple boucle piqué (passé en double) et une main posée à la réception du triple Lutz lui coûte cher. Je trouve le programme mal construit et l'effort chorégraphique un peu faible. En gros, le thème n'est pas réellement interprété. Mais un double Axel bonifié et des éléments, tous de niveau 4, lui valent de prendre la tête de la compétition sans discussion possible. (69.05 points). 

 

Maria Sotskova dans sa jolie robe rose sucré, interprète un Lac sur lequel le cygne n'est ni blanc ni noir, puisqu'elle est une jeune fille, valsant dans un grand bal.  Son programme a, en effet, toute l'élégance d'une jeune première sur les parquets brillants et sous les ors d'un salon russe du 19ème siècle.  L'erreur qu'elle commet sur le triple flip et des niveaux 3 (Flying Camel Spin et séquence de pas)  l'empêchent de prendre la tête, mais le reste de sa prestation est propre, net et sans bavure. (67.79 pts)

 

Yuna Shiraiwa prend la troisième place. Sur la "File aux Cheveux de Lin" de Claude Debussy en version Nigel Kennedy et l'English Chamber Orchestra, sa robe rose et vert pastels,  parée de dorures,  est aussi délicate et vaporeuse que son patinage. Quelques "0" dans les GOE mais aucun point négatif et même deux derniers sauts bonifiés pour la demoiselle qui enchaîne triple Lutz/triple boucle piquée, double Axel et triple flip avec une joyeuse aisance et empoche des niveaux 4 partout sauf sur sa séquence de pas. Son score de 66.05 points est peut-être un peu bas ? 

 

Où est la favorite, Alina Zagitova dans tout cela ? 5ème (62.46). On ne s'attendait pas à la voir chuter ni en sous-rotation sur des sauts (triple Lutz, triple flip), qu'elle maîtrise d'habitude sans sourciller. Le montage musical de son "Black Swan" est pénible à l'oreille, décousu, ce qui ne doit pas l'aider. Mais elle s'en était beaucoup mieux accommodée lors de ses précédentes prestations. Elle est apparue aujourd'hui un brin crispée, le visage fermé. Peut-être accuse-t'elle une petite baisse de forme. Son programme libre demain, devrait lui permettre de remonter plusieurs places au classement si elle ne commet plus d'erreur. 

 

Laurine Lecavelier, seulement 7ème avec 60.68 points, n'aura pas été chère payée. Alors que j'avais un instant regretté qu'elle ait abandonné Ashram au profit de Michel Legrand, je l'ai trouvée confiante, brillante, tout en étant à la fois toute grâce et délicatesse. Elle transcende totalement la musique d'un "Eté 42". Une sous-rotation (triple boucle piqué combiné à son triple Lutz d'entrée) et des niveaux 3 l'empêchent de monter dans le classement. 

 

Maé-Bérénice Méité est 8ème avec  58.96. Je ne suis pas grand fan de la composition musicale de son programme, mais elle l'interpréte avec talent et se bat, comme d'habitude, jusqu'au bout des ongles et des lames. Les erreurs sont minimes mais nombreuses,  leur addition finit par coûter cher. Dommage. 

 

Deux autres patineuses se sont distinguées, et pas dans le bon sens  : La Kazakhe Tursynbaeva et sa version de Carmen par David Garett ultra urticante (quitte à reprendre un morceau aussi usé, autant utiliser l'original !), mais dont le patinage trop classique jure, du coup, avec la musique ; et la Russe Tuktamysheva, grand espoir passé, qui semble hélas continuer sur la mauvaise pente. Thème bateau, robe criarde, triple Axel atterri parterre, triple Lutz éclaté en simple et donc invalidé, la jolie brune au regard bleu hypnotisant termine... 11ème et dernière de ce programme court (53.03), sans doute une des pires prestations de sa carrière. On ne peut que lui souhaiter mieux pour demain puisque, de toute façon, ça ne pourra pas être pire. 

 

© S.I.G., sur place : Kate Royan