© Tanya Drubetskaya
© Tanya Drubetskaya

Euros 2018 - Libre Dames


 

Il était une fois, deux Russes et Carolina...

 

 Les deux premiers groupes m'ont plus marquée par la qualité des jolies robes de ces dames que par celle de leur patinage... Le programme le plus intéressant était celui de l'Italienne Giada Russo, capable de tirer profit de chaque accent musical. Même lorsque ses sauts sont mal engagés (et c'était le cas ici, malheureusement), sa présentation est supérieure à celle de patineuses des meilleurs groupes. 

 

Après le passage des deux premiers groupes, Nicole Schott est en tête avec un programme libre patiné sur "La Liste de Schindler". Choix curieux qui ne m'a pas mise à l'aise.  [NDLR : l'auteur de l'article est israélienne]. Quitte à faire dans le drame, je l'aurais préférée sur la 5 ème Symphonie de Mahler. Heureusement, Nicole était dans un bon jour et son programme a été sans tache. 

 

L'avant-dernier groupe comprenait les "deux petites soeurs", soit Eliska Brezinova, soeur cadette du Tchèque Michal Brezina et Loena Hendrickx, de Belgique, soeur cadette de Jorik. Ce dernier n'a terminé que 10ème pendant que Loena nous offrait un très joli programme, avec les premiers sauts "Tano" et "Rippon" de la compétition dames. Eliska n'a fini que 13ème du court (son frère était 8ème) et Loena bat son frère à plate couture en se classant 5ème, ce qui a fait d'elle l'attraction de la soirée. Les demoiselles russes et Caroline Kostner sont bien sûr parmi les médaillables, mais Loena a vraiment été la grande surprise de ce programme. Son tango, très rapide, ses excellents sauts et ses qualités d'expression en ont fait une des favorites du public.  Maé-Bérénice Meité m'a, par contre, parue un peu lente, comme si elle prenait ses précautions. A l'exception d'un triple boucle passé en simple, son programme a néanmoins été très propre. La première partie est patinée sur du Chopin et n'a visiblement pas enthousiasmé les foules. Maé, connue pour son style athlétique, n'est pas faite pour un rôle de princesse de la glace. Mais le public s'est réveillé en deuxième partie de programme, beaucoup plus enlevée. La Finlandaise Emmi Peltonen et la Tchèque Eliska Brezinova, dont nous avons parlé plus haut, ont toutes les deux raté leur programme. 

 

Laurine Lecavelier a repris son libre de l'an dernier, ce qui aurait dû l'aider, mais elle a raté presque tous les sauts de sa deuxième partie de programme. Tout avait pourtant bien démarré avec une combinaison triple Lutz/triple boucle piqué (même si le second triple était légèrement en sous-rotation). Mais les erreurs accumulées donnent une idée de la pression qui pesait sur elle et à laquelle elle n'a pas pu résister. 

 

Le dernier groupe a été ouvert par la Suédoise Anita Östlund qui gagne le titre de patineuse la plus inconstante de la compétition ! Après avoir été 6ème du programme court, elle termine 20ème du libre, ce qui la classe en 17ème position du classement général. A l'opposé, Nicole Rajicova a été l'auteur d'un programme réussi, qui prouve une fois de plus qu'elle appartient sans conteste au groupe des meilleurs Européennes. 

 

Mais la vraie bataille, celle pour les médailles, commence avec la Russe Maria Sotskova. Victime d'une chute à la réception de son triple Lutz, le reste de sa prestation est sans erreur. Elle paraît très stressée au départ, mais son programme est très agréable et son patinage très doux. L'Italienne Carolina Kostner entre dans l'histoire en remportant sa 11ème médaille européenne ! Elle se classe derrière Sotskova dans le libre, mais avec une avance de 10 points dans le programme court, elle parvient à empocher le bronze. Elle apparaît dans une toute nouvelle tenue, une combinaison vert anis pailletée, qui serait ridicule sur n'importe quelle autre femme. Mais sur Carolina, l'effet est, comme d'habitude, magique. Plus tard, elle admettra qu'elle n'était certaine de garder ce costume, inspiré par l'original d'un ballet de Nizhinski,  et qu'elle devrait revisionner la vidéo de son programme avant de se décider à continuer de le porter.  
La nouvelle prodige russe, Alina Zagitova termine avec un score si élevé (157.97) qu'on pourrait presque le qualifier de grotesque. Il peut néanmoins se justifier par le contenu technique de son programme, le plus dense actuellement au plan mondial, et par l'absence totale d'erreur. La deuxième note reste discutable par la plupart des connaisseurs. Deux fois championne du Monde et deux fois championne d'Europe, il faudrait à Evgenia Medvedeva, qui passe sur la glace juste après sa compatriote, battre son propre record de 10 points pour battre Zagitova. Malgré un programme propre, à l'exception d'une erreur de carre, ce sera impossible. 
Nous voici donc à la fin d'une ère, avec ce qui a probablement été les derniers championnats d'Europe de Carolina Kostner. Essayez donc de battre son record : 11 médailles européennes, soit une à chaque participation depuis 2006 ! Medvedeva pourra-t-elle en faire autant ? Et Zagitova ? La première a déjà deux titres européen et une médaille d'argent, la seconde vient de gagner pour la première fois. Kostenr a disputé ses premiers championnats en 2013 il y a... 15 ans. Medvedeva et Zagitova seront-elles encore là en 2033 ? Après le départ de l'Italienne, les Russes vont-elles, à l'avenir,  s'approprier tous les podiums ou les jeunes femmes d'autres pays auront-elles aussi leur mot à dire ? 
© S.I.G. - Sur place : Tanya Drubetskaya